Quand on se promène entre Pleumartin et la Roche-Posay, on remarque çà et là les traces de l’ancienne ligne de chemin de fer. Des anciennes gares, des ponts, des trouées dans le paysage. Aujourd’hui désaffectée, cette ligne de chemin de fer a pendant longtemps rythmé la vie des locaux.
La ligne reliait Châtellerault (86) à Tournon-Saint-Martin (36).
Au regard d’articles de presse, on relève que la population se mobilise en 1872 pour la création de la ligne. Par la suite, la ligne est déclarée d’utilité publique le 11 juin 1880. Cependant, le projet de loi nous apprend que différents tracés ont été étudiés…
Le tracé primitivement étudié par les ingénieurs, et qui a été soumis à l’enquête, se détache de la ligne de Tours à Bordeaux à 600 mètres environ de la gare de Châtellerault; il s’élève sur le plateau qui sépare la Vienne de la Gartempe, dessert Seniillé et Pleumartin, passe près de Crémillé et descend vers la Gartempe, qu’il traverse, pour se diriger vers la Creuse en franchissant le faîte séparalif des deux rivières au col de la Beauge. Le tracé remonte ensuite la Creuse sur la rive gauche jusqu’à Néons, passe sur la rive droite et atteint Tournon-Saint-Martin où il vient se raccorder avec ]a ligne de Preuilly à Tournon. La partie du tracé comprise entre Châtellerault et Pleumartin n’a donné lieu à aucune observation; la portion qui s’étend de Pleumartin à Tournon a soulevé, au contraire, des objections nombreuses.
On a fait remarquer avec juste raison que, si le tracé soumis à l’enquête offrait, au point de vue technique, les conditions les plus favorables, il restait éloigné des centres de population les plus importants.
Les ingénieurs ont été conduits à étudier deux variantes. La première se détache du tracé primitif à la hauteur du village de Cremillé en se dirigeant plus au nord, passe à un kilomètre de la Roche-Posay, traverse la Creuse en aval du confluent de cette rivière avec la Gartempe, remonte la rive droite de la Creuse, et vient se raccorder près de Tournon avec le tracé primitif.
La variante par Vicq se détache également du tracé de l’avant-projet près de Crémillé, s’infléchit vers le sud, passe à 2 kilomètres environ de Vicq, traverse la Gartempe, remonte, en suivant la vallée de l’Hérault, sur le faîte séparatif de cette vallée avec celle de la Creuse, descend vers cette rivière avant de l’avoir franchie, rejoint le premier tracé. La longueur à construire, dans l’hypothèse du tracé primitif, serait de 40 kilomètres, elle serait de 43 kil. 900 mètres par la Roche-Posay et Yseures, et de 39 kil. mètres par
Vicq.
Au final, le tracé par la Roche-Posay est retenu par les députés suite à l’offre faite par les Conseils municipaux des communes de la Roche-Posay et d’Yzeures , dans leurs délibérations des 19 octobre et 9 novembre 1879, de payer à l’Etat: le premier, une subvention de 25.000 francs, et le second,
une subvention de 30.000 francs pour l’établissement de la ligne de Châtellerault à Tournon.
La ligne ouvre le 2 février 1891. Elle est concédée à titre définitif par l’État à la Compagnie du chemin de fer de Paris à Orléans (PO).
L’ouverture de la ligne bouleversa les modes de vie dans les villes et les villages traversés qui intégrèrent rapidement ce moyen de transport à leur quotidien.
Dès 1893, la presse relate des incidents sur la ligne parfois dramatiques.
Singulier accident de chemin de fer
Ces jours derniers, racontent les journaux de la Vienne, un train a subi, aux environs de Châtellerault, un assez long retard, par suite d’un accident qui n’est certes pas commun.
Entre La Roche-Posay et Châtellerault, deux bœufs s’en allaient cheminant le long des rails, lorsque le train arriva. Surpris par le bruit, les animaux se retournèrent. Les lanternes ne les épouvantèrent point, aussi furent-ils tamponnés…
L’un des bœufs roula sous la machine ; le second fut atteint d’une telle façon qu’il s’embrocha littéralement dans le tampon.
Le train s’arrêta, les voyageurs descendirent. Le malheureux bœuf beuglait lamentablement sous la locomotive et fut difficilement dégagé. Quant à l’autre, on ne savait trop comment s?en débarrasser, lorsque des bouchers, qui » »se trouvaient dans le train, se mirent en devoir de le dépecer.
Le Grand écho du Nord de la France Date d’édition : 1894-03-06
Un accident mortel en 1928
En 1904, les édiles locaux réclament auprès du Préfet et du Conseil Général de la Vienne des aménagements concernant l’expédition en petite vitesse des wagons de bestiaux.
« MESSIEURS,
« Le conseil municipal de la Roche-Posay, dans sa séance du 23 décembre, expose qu’autrefois les wagons de bestiaux provenant des lignes correspondantes expédiées en petite vitesse étaient attelés aux trains légers du matin et du soir sur la ligne de Châtellerault à Tournon. Ce service a été modifié depuis quelque temps, et les wagons ne sont plus attelés qu’en grande vitesse. Les gares de Sonillé, Leigné-les-Bois, Pleumartin, La RochePosay et Yzeures sont dans ce cas. Ce changement de service porte un grand préjudice aux négociants et propriétaires, qui ne peuvent recevoir d’animaux sans qu’ils aient souffert de fatigues et de privation de nourriture.
« Votre Commission vous propose d’émettre le voeu que la compagnie d’Orléans revienne sur sa décision d’exception, et que les wagons de bestiaux provenant des lignes correspondantes soient attelés aux trains légers du matin et du soir sur la ligne de Châtellerault à Tournon. »
SÉANCE du 12 MAI 1910
Ligne de Châtellerault à Tournon-Saint-Martin. — Création d’un train supplémentaire, les jours de foire de Châtellerault.
« M. Martin, conseiller général, a déposé sur le bureau du Conseil une pétition couverte d’au moins 700 signatures d’habitants des cantons de Châtellerault et Pleumartin, tendant a obtenir de la Compagnie d’Orléans, un tram supplementaire les jours de foire de Châtellerault (le jeudi de chaque mois) partant de cette ville entre quatre et cinq heures du soir, se dirigeant sur Tournon Saint-Martin.
Les trams se formant au Blanc, celui demandé pourrait partir de cette localité à 10 h. 1/2 du matin pour arriver a Châtellerault vers midi et en repartir comme il est demandé parles pétitionnaires.
Les motifs invoqués par les pétitionnaires sont les suivants:
« Il y aurait pour les cultivateurs et les voyageurs de ce toutes les communes desservies par cette ligne, un très grand intérêt a la création de ce train. Les achats, aux foires de Châtellerault, se faisant surtout de midi a trois « heures, il est impossible d’embarquer les animaux. « Cette ligne, n’ayant qu’un seul train par jour prenant des animaux en petite vitesse nous nous trouvons dans l’obligation ou de payer un tarif très élevé, ou de laisser vingt quatre heures nos animaux dans les auberges, ce qui occasionne de grands frais.
11 est aussi très difficile de débarquer des animaux en pleine nuit, ce qui arrive pendant sept mois de l’année. Ce train serait aussi très utile pour les voyageurs qui, « ayant fini leurs affaires pourraient rentrer chez eux ce beaucoup plus tôt. La Compagnie Paris-Orléans trouverait une large ré munération des frais occasionnés par cette création. Le nombre des voyageurs augmenterait car beaucoup de personnes qui vont en voiture, ne pouvant attendre le train du soir, iraient et reviendraient par chemin de fer ; ce et la plupart des cultivateurs préféreraient payer le transport de leurs animaux en petite vitesse, que de leur faire faire 20 ou 25 kilo m sur route, ce qui, pour ce certains animaux, est difficile et dangereux.
« Si la Compagnie P. 0. obligée de faire venir ce train « du Blanc pouvait le faire arriver a Châtellerault le matin entre 11 heures et midi, il n’est pas douteux qu’elle aurait beaucoup de voyageurs, car cette commodité diminuerait énormément le nombre de personnes allant « en voitures »
Cependant, le déclin de la ligne voyageurs s’amorce avec le développement des lignes d’autobus dès la fin des années 20.
Le service voyageur ferme le 15 septembre 1939. Le service marchandises fermera progressivement en octobre 1951 entre Châtellerault et Pleumartin. Le 16 décembre 1973, le dernier tronçon entre Pleumartin et la bifurcation de Launay située à un peu plus de 2 kilomètres au Nord de la gare de Tournon-Saint-Martin cesse son activité.
Il a été donc un temps où l’on allait en chemin de fer de Pleumartin à Tournon ! Où à La Roche-Posay, le train s’arrêtait en gare prendre des voyageurs…
Il est encore possible de cheminer sur l’ancienne ligne grâce au site http://www.inventaires-ferroviaires.fr/ qui propose une fiche itinéraire permettant de retrouver la ligne disparue !
http://www.inventaires-ferroviaires.fr/hd86/86193.a.pdf
Les articles de presse et les extraits de lois sont tirés de gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France.
Les CPA sont issues de collections personnelles.